Albert sur la plaine

La jeune femme eut un sourire sans véritable joie. Elle garda tout de même un ton poli.

Si je peux me permettre, parfois il faut apprendre à connaître ce qui nous entoure pour...pouvoir survivre. Et croyez-moi, s'il y a bien quelqu'un qui aurait besoin de ses connaissances, c'est moi.

Elle se forçait à garder un ton de voix le plus neutre possible. Elle n'avait pas vraiment envie non plus de tout raconter sur ce qui s'était passé. Le bébé émit quelques petits pleurs pas très forts. Saphyra s'empressa de le repositionner dans ses bras et lui chuchota quelques mots doux, ce qui le calma un peu.

Pourriez-vous me dire d'abord quelle est leur origine?

La jeune femme écoutait attentivement. Elle aurait bien aimé cependant pouvoir s'asseoir pour mieux écouter. Le bébé n'était pas particulièrement lourd, mais la concentration demeurait plus élevée lorsqu'on se trouve dans une position plus confortable.

Si ça se trouve, Emlok doit être un pays qui a justement mis de côté la guerre entre les Tempussiens et les Narzuléens pour mieux combattre les créatures qui hantent nos terres. Je n'ai jamais vu de combat ou de promesse de combat ouvert entre ces deux clans depuis que je suis ici.

Certes, elle avait vu qu'ils ne s'aimaient toujours pas, mais ils coopéraient parfois en situation de crise. Elle se rappela son sujet principal.

Mais bon, pour en revenir aux démons, savez-vous ce qui s'est déjà passé par rapport à eux ici à Emlok? J'ai entendu certaines choses mais bon...C'était beaucoup plus des histoires personnelles. Ont-il déjà pris le contrôle d'Emlok?

La jeune femme, toujours intéressée par ce qu'il disait, remarqua tout de même son attitude et son air.

Vous savez, vous n'êtes pas obligé de me répondre si cela vous met mal à l'aise. Si je suis venue vous voir, c'est que vous m'avez tout l'air d'être une des seules personnes qui voudraient bien répondre à mes questions...

Elle fixa son bébé quelques instants, essayant de ne pas se laisser envahir par ce qui était arrivé. Elle ne savait pas encore si elle devait pleurer toutes les larmes de son corps ou exprmier la colère qui la hantait depuis un long mois. Lorsqu'elle releva la tête vers Albert, ses eyux exprimaient une multitude d'émotions, toutes plus contradictoires les unes que les autres.

Vous restez neutre par rapport à ce qui se passe ici. Vous ne semblez pas avoir un quelconque intérêt ou mission à servir, mis à part de propager votre enseignement. À moins que je ne me trompe...?

Elle s'attendait un peu à ce qu'il agisse comme tous les autres et qu'il parte...mais elle attendait tout de même, au cas où.

Saphyra sourit faiblement lorsqu'il parla de quelque chose de rassurant. Les quelques fois où elle s'était sentie rassurée à Emlok n'avaient pas été très longues...toujours brisées par un évènement quelconque.

J'ai cru remarqué en effet...un certain petit groupe, dont deux membres en particulier...

La jeune femme baissa la tête, plongeant dans certains souvenirs douloureux encore une fois. Comme pour la ramener à la réalité, son petit poupon gigota un peu. Elle releva la tête en écartant un peu els mèches rousses qui lui tombaient devant les yeux.

Pour en revenir au sujet de mes questions, si vous êtes mal à l'aise, vous pouvez toujours refuser d'y répondre. J'espère simplement que cela n'est pas parce que je suis une femme...

Elle haïssait cette discrimination et cette tendance à ne rien espérer d'intelligent des femmes.

La jeune femme ne s'était pas vraiemnt attendue à cette réaction. Elle pencha la tête un peu et dit avce une voix plus douce.

Je vous assure que je ne pensais pas cela de vous. Pardonnez-moi, je vis certaine choses difficiles en ce moment qui m'embrouillent l'esprit.

Pour s'empêcher de sombrer à nouveaux dans ses pensées, elle continuait de fixer son interlocuteur. Les émotions se succédaient rapiement dans ses yeux tout de même.

La jeune femme sourit un peu sans véritable joie.

Peut-être...Seulement, laisser sortir ses émotions au bon moment peut être une bonne motivation.

Elle tâchait de garder un visage impassible, mais ses yeux la trahissait considérablement. Ils étaient à présent remplis d'un profond désespoir et de tristesse.

Cependant, j'ai déjà essayer de ne pas retenir mes sentiments. Et cela n'a servi à rien. Absolument rien.

Elle se ressaisit un peu, retrouvant une voix un peu plus douce.

Mais je n'étais pas venue pour vous faire part de tout cela. Je ne veux pas vous embêter d'ailleurs.

Entre-temps, elle s'était ressaisie un peu. Elle réfléchit un instant pour être certaine de la clarté de ses propos.

Je voudrais en apprendre plus sur les créatures surnaturelles que sont les démons. Par curiosité et aussi pour savoir à qui j'ai à faire. Si vous pouvez m'en apprendre plus sur l'un d'autre eux ce serait encore mieux. Le même que Ternès déteste, si cela peut vous éclairer.

Son expression était toujours impassible, mais, pendant un bref instant, son regard sembla traversé par une profonde douleur qui partit aussitôt.

Je n'ai pas de question précise à son sujet. J'aimerais simplement savoir ce que vous savez sur lui.

La jeune femme sourit un peu. Il est vrai que dès qu'on parlait d'une créature surnaturelle et à tendances méchantes...des êtres que presque tous les tempussiens essayaient d'enrayer.

Je parle plutôt de celui qui le provoque à chaque fois qu'il vient en Emlok. Du prince des sept péchés, le démon Apolgec.

Le petit paquet dans ses bras commençait à gigoter plus fréquemment. Il émettait de petits sons qui faisait sourire sa mère à chaque fois ou presque. Elle jeta un regard à Albert.

J'espère qu'il ne vous dérange pas...Dit-elle avec un petit sourire en observant son enfant.

Satisfaite de sa première réponse, elle observa son bébé quelques secondes avant de porter son regard sur Albert. Elle perdit néanmoins son sourire lorsqu'il parla d'horreurs.

Je ne doute pas un instant que cela soit vrai. Vous n'êtes définitivement pas le seul à avoir vécu certaiens choses le concernant...

Elle baissa les yeux vers la main droite, où l'on devinait la présence d'une bague sous son gant noir. Elle sembla perdue dans ses pensées un instant avant de lâcher sa main du regard.

Je ne veux en aucun cas vous forcer à me dire ce que vous savez...même si cela me serait utile. Je peux essayer de trouver quelqu'un d'autre qui voudra bien m'en parler...quoique la plupart des gens préfère éviter ce sujet.

et souvent avec raison , se dit-elle. La plupart n'avait aps de très beaux souvenirs aussi.

La jeune femme était restée là, sans rien faire ni rien dire. Elle réfléchissait, perdue dans ses pensées. Lorsque Merel vint lui parler, elle n'avait pas remarqué le temps passer. Elle le fixa quelques instants, comme surprise de le trouver là. Elle sourit faiblement lorsqu'elle vu le verre d'alcool. Elle avait soif tout à coup...Saphyra reprit ses esprits et son visage redevint un peu plus impassible.

Je ne sais pas non,où il est parti. Je ne crois pas que vous pourriez le rejoindre, il semble apparaître et disparaître au moment où il le désire.

Le ton employé par le sylvarois l'avait un peu étonnée, mais elle n'était pas sans apprécier un peu de compagnie. Elle avait été si seule depuis un moment...mis à part la présence de son bébé qui commençait à s'agiter. Lui aussi avait soif.

La jeune femme sourit. Elle le trouvait sympathique et il ne semblait pas la juger. Elle hocha la tête en souriant et prit doucement le verre qu'il lui tendait. Elle en but une gorgée, ce qui la fit sentir bien tout d'un coup.

Tu es un sylvarois, n'est-ce pas?

Elle parlait avec un ton plus joyeux qu'au début. Cette rencontre avait éveillé son attention. Pendant deux mois, elle avait vécu dans une bulle remplie de pensées mauvaises. Elle venait de retourner à la réalité d'une façon un peu brutale, mais tout de même.

La jeune femme but une autre gorgée, pas trop grosse, car elle allaitait toujours. D'ailleurs, elle ne semblait pas être la seule à vouloir boire...Le petit s'agitait sous les couvertures.

Bon...Évidemment, c'est miantenant.

Elle regarda le sylvarois d'un air observateur et un peu plus neutre.

Cela te dérangerais que je m'occupe de lui un instant? Nous ne sommes pas les seuls à vouloir boire...

Elle jeta un petit coup d'oeil aux alentours avant de repérer une roche sur laquelle elle alla s'asseoir à environ deux mètre du sylvarois.